Le Jeu de Rôle sur table (JDR) est un jeu de société reposant sur l’improvisation et l’incarnation d’un personnage, à la manière d’une pièce de théâtre (Bonnet, 2017). En groupe, les joueurs imaginent et décrivent les actions de leurs personnages au sein d’un univers fictif, décrit par eux également. Ainsi, le jeu de rôle vise à créer un récit collectif, sorte de conte interactif, dans lequel les joueurs occupent le rôle principal. Le médium est porteur d’une expérience riche, complexe, dont la pratique narrative et créative est également éminemment relationnelle, intersubjective, qui confronte tant à l’ipséité qu’à la mêmeté, à travers l’incarnation de son propre personnage mais aussi à travers la confrontation au groupe. Le JDR se présente alors comme une pratique qui engage profondément l’identité narrative et qui présente de nombreux intérêts pour les joueurs, qui rapportent y trouver un espace de sécurité (Hugues, 1988) ainsi que la possibilité de se réapproprier une capacité « agentive » au contact d’un support d’interactivité presque sans limites (Caïra, 2020).
De plus, s’il tend à s’exporter en dehors des sphères ludiques pour s’inscrire au sein des enjeux de soin, de support, d’accompagnement dans des champs aussi divers que la pédagogie, l’éducation, l’orthophonie, la formation ou la psychothérapie, c’est parce qu’il présente aussi des intérêts pour les
patients et les usagers des services médico-sociaux dans leur acception la plus large. Ainsi, le JDR a pu montrer sa pertinence pour favoriser les apprentissages, l’acquisition de compétences dans le processus de formation, mais s’avère également facilitateur des processus thérapeutiques en donnant des résultats positifs en termes de régulation des émotions, dans le traitement des problématiques anxieuses et dépressives, dans l’accroissement du processus de résilience, pour accompagner les jeunes porteurs de troubles du comportement (Rosselet et Stoffer, 2013 ; Abbott et al., 2022 ; Boulay, 2023).
Ainsi, si le JDR mobilise l’identité, la subjectivité, il est également un facilitateur potentiel du processus de changement et de l’évolution des patients-joueurs (Polkinghorne et al., 2021 ; Kerr et al., 2020). Le JDR devient un support de transformations et de transmissions, dans des situations symptomatologiques, pathologiques caractérisées par l’impasse, la rupture.
De par ses dimensions multiples, le JDR offre une multitude de ressources (à travers le groupe, la créativité, la narration, le jeu…) et la possibilité de construire une autre expérience de soi et de l’autre : à travers le roleplay et l’incarnation de personnage ; au sein d’un groupe réuni par un même objectif de création, de narration ; une expérience de plaisir potentielle par la rencontre avec les différents espaces du jeu ; une aire de transformation dans laquelle exprimer une part de soi vécue comme contrariée par les exigences sociales ; la confrontation à des situations inhabituelles et la possibilité d’y exprimer une part de soi habituellement inaccessible…
C’est alors la richesse de ce médium, ses déclinaisons possibles en termes de gameplay, de création de récit, d’organisation groupale, les effets qu’il produit chez les patients-joueurs, qui restent à explorer pour tenter de dégager quels motifs sont opérants et favorisent l’émergence des processus de transformations et de transmissions, ainsi que leur nature. Ce séminaire visera à explorer la diversité des settings de JDR mobilisés dans le champ clinique ; les effets de transformations et de transmissions qui émergent en séance(s) ; les effets qu’il produit au-delà du jeu et la manière dont l’expérience qui y est faite peut s’exporter et constituer un bagage qui dépasse le cadre de la session. De manière plus globale, nous nous intéresserons aux différentes formes de JDR et à leurs effets sur la subjectivité de celui qui joue.
Nous invitons donc l’ensemble des acteurs œuvrant dans le champ de l’accompagnement au sens large et qui s’intéressent au JDR, tant sur le versant de la pratique que de la recherche, à répondre à cet appel à communication.
Les propositions de communications pourront s’intéresser, notamment, aux problématiques suivantes :
- Transmissions et transformations à travers le JDR : ce qui se transforme dans l’expérience de soi, de l’autre, dans les relations, les compétences, le rapport au monde …
- Le JDR dans le soin, l’accompagnement, la prévention : spécificités de l’utilisation du JDR en contexte clinique, au-delà du divertissement ;
- Le processus de changement dans le JDR : sa nature, ses frontières et les modalités de son émergence ;
- Formes et particularités des interactions en atelier JDR;
- D’autres idées peuvent également être développées;
Les propositions de communications :
– Doivent être transmises à l’adresse suivante : corentin.boulay@unil.ch
– Doivent comporter : un titre et un bref résumé de la communication (500 à 700 mots) – Sont à adresser avant le 16 octobre 2023Nous transmettrons une notification d’acceptation ou de refus des propositions de communication à partir du 23 octobre 2023.
Déroulement du séminaire :
Le séminaire se déroulera les mardi soir, à rythme mensuel, de 20h à 22h, à partir du 19 décembre jusqu’au 13 février, en ligne.
Chaque communication pourra durer entre 30 minutes et 45 minutes, et sera suivie d’un temps d’échanges avec le public.
Comme pour la session précédente, les séances du séminaire seront enregistrées et mises en ligne sur YouTube (sous réserve d’accord des communicants).
Corentin Boulay,
Pour le réseau JDR & accompagnement : pratiques et recherche.Responsables : Corentin Boulay Nicolas Stock
Dans le cadre des activités des Laboratoires LARPsyDIS (Université de Lausanne) et INTERPSY (Université de Lorraine)